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Kokoro, subspace et état de flow sur les flots bleus de l’hiver de force

Par Monsieur Valmont | 294 lectures | Temps de lecture ~ 10 minutes

Barrage, réservoir et évacuateur de crues souvent appelé l’escalier de géant, de l’aménagement Robert-Bourassa dont la centrale est souterraine. Photo : hydroquebec.

Ce que Yukimura-sensei enseignait, ce n’est pas une succession d’étapes pour réaliser une figure, il enseignait comment prendre possession du cœur de la personne attachée, comment toucher la personne attachée.

Je lis attentivement ce passage, le relis. Une lecture de chevet.

Que n’ai-je fait d’autre depuis le premier jour, si ce n’est de chercher à percer sa cuirasse? Non pas pour le simple plaisir de la percer. Ce serait un peu court et beaucoup d’ouvrage pour un bénéfice somme toute marginal. Non, il s’agit plutôt de faire voir toute la beauté en elle et qu’elle ne soupçonne peut-être même pas elle-même… Ou qu’elle ne veut pas voir? Ou qu’elle n’accepte pas? ou mal?

On va faire un peu de lumière…

Mehr Licht!

Partons du postulat que la soumise est une rivière et mouah, le Maître, je suis un barrage.

Pas de soumise? Pas de rivière. Pas de rivière? Pas de barrage. Pas de barrage? Pas d’électricité. Pas d’électricité? Pas d’électricité. Sans électricité, il ne se passe absolument rien : aucune tension, zéro scintillement, l’aiguille du plaisir se tord d’immobilité sur le voltmètre usagé.

Quant à la beauté, chère au poète…

Je poursuis ma lecture.

« Les japonais utilisent le mot Kokoro, qu’on traduit habituellement par « cœur » mais qui peut avoir une signification plus proche de « esprit ». Ici « prendre possession du cœur » ne veut pas dire que la personne attachée va tomber amoureuse de vous, mais plutôt que vous êtes capable d’interagir ou de contrôler son monde intérieur, ses fantasmes, ce qui peut être une manière de tomber amoureux… »

Quatrième leçon avec Yukimura-sensei d’Ugo san, traduit du japonais vers l’anglais par NuitdeTokyo (juin 2014) et vers le français par Ichinawafred (juin 2017).

Existe-t-il une manière plus claire de résumer tout le défi de l’échange de pouvoir érotique? Merci messieurs de nous transmettre… cette passion du coeur!

Vers le destin insolite de la jute

Si j’évoque ces courts extraits d’une leçon de kinbaku que donna Yukimura Haruki à l’un de ses jeunes padawans, il y a quelques années, c’est qu’aujourd’hui j’ai senti que je l’avais atteinte avec la corde, ma belle pouliche des steppes.

Je l’ai atteinte, dis-je, non pas une, mais deux fois. Avec, en prime, des orgasmes à la chaîne. Ce que Masters et Johnson ont désigné par l’expression status orgasmus, ou quand ça ne veut plus arrêter… Quel est ce prodige? Avant la seconde fois, j’étais certain de l’avoir échappée, perdue. Déjà, fouler la mer promise n’a rien d’un automatisme. Deux fois? La jute serait-elle multi-orgasmique?

« Yukimura sensei décrivait souvent son approche en termes de Shobu, gagner ou perdre, point décisif, parce qu’il s’intéressait à la tension créée par une position risquée. »

Septième leçon avec Yukimura sensei d’Ugo san, traduit du japonais vers l’anglais par NuitdeTokyo (2014, 2019) et vers le français par Ichinawafred (mars 2019).

Shakespeare peut aller se rhabiller. L’échapper ou l’attraper, c’est de l’attraper, la question. Ensuite… de la rattraper.

Le bambou complice

Au petit matin, à notre arrivée chez ma soumuse (je laisse le lapsus), je sors tout le stock de cordes, démêlant les longueurs, puis quelques accessoires en apparence inoffensifs : une brique, quelques bâtonnets de cire, un foulard, un fin Laguiole, un briquet… mon café!

Dans cet ordre.

Il y a un bon moment que je m’étais fait la promesse de me régaler à nouveau, avec la complicité de la poutre de bambou. Elle est toujours en fonction dans le salon… même si en ce moment, Ô sacrilège!, elle est ornée de lumières de Noël de la taille d’une mine de crayon de plomb. Des lutins à chacune de ses extrémités font les guignols.

Qu’à cela ne tienne, le moment était enfin arrivé.

La crinière du bonheur

– « Aujourd’hui, ma chérie, j’ai envie de vous contraindre… vous restreindre… vous faire mal », que je lui chuchote.

Elle est à mes genoux, docile.

Elle baigne dans cette attente frémissante qui précède le corps-à-corps sans baïonnettes. Je la saisis par la chevelure, abondante, pour lui tisser une belle queue de cheval avec mes trois mains. J’y applique un noeud tout simple, passe la corde à travers la touffe ainsi retenue à l’aide d’un doigt d’honneur, puis enroule un autre noeud sur la queue.

Je peux dès lors tirer solidement sur la crinière. Désormais, rien ne se défera que je n’aurai défait.

Après quelques exercices de servo-direction, du bout des doigts je lance la corde par-dessus bord la tige de bambou, avant de faire signe à la brique de s’approcher. Elle s’amène avec ses trois orifices. J’en enfile deux puis repasse la corde par-dessus le bambou.

Les lois subtiles de la physique des cordes

À fin finauder avec les théorèmes de Newton et le principe d’incertitude cher à Heisenberg, je finis par obtenir une tension qui commence à me plaire… et à déplaire à ma pouliche zébrée. J’ouvre sa bouche avec mes doigts. Ses dents vont retenir sous peu ce que le bakushi appelle le nawajiri 縄尻, c’est-à-dire ce bout libre de la corde, le courant, qui sert aussi de canal de communication.

Elle comprend très bien mon intention. Elle ne craint pas que le ciel lui tombe sur la tête, non. Ce serait plutôt la brique. J’en rajoute, rieur et subversif, en lui rappelant l’importance de garder les dents serrées, si elle ne veut pas que…

J’éclate de rire.

Elle grimace, gémit, me regarde, implore ma clémence sans vraiment la vouloir, ouvrant les yeux une seconde sur dix. Elle est déjà partie.

高手小手 aka takate kote

Je n’insiste pas trop sur la perfection du pattern du gote, j’avoue. Je me contente de suivre la corde.

Sur le chemin de son Eros, je réalise que mes dix mille sept cent quatre-vingt dix-neuf visionnements de la vidéo du takatekote de GanRaptor, ont imprimé un calque sur ma rétine (pas la version ci-dessus, celle qui se trouvait jadis dans Youtube qui a la fâcheuse manie de nous dire ce que nous avons le droit de voir et ce que nous n’avons pas le droit de voir…).

Je me laisse donc glisser le long du calque imaginaire, sans me poser de question.

Pourtant, j’aurais dû.

Au moment d’arriver au bout, je constate que je me suis trompé avec ma première corde, plus courte (8 mètres) que celle que j’utilise généralement (12 mètres) pour le gote.

Phoque!

Pendant deux secondes qui en ont paru 86, j’ai entrevu l’écrasement de l’appareil : pas de survivant, des zilliards de curieux, des familles éplorées, des assureurs nerveux, des médias furieux, c’était la cata… Dès la troisième seconde, je me suis dis qu’au lieu de tout recommencer, j’allais poursuivre ma route; à la quatrième, que je ne relierais pas les cordes l’une à l’autre, comme je le fais toujours.

La valse du solstice d’hiver

Ce que j’ai remarqué dans ma corde aujourd’hui, c’est la fluidité de ses mouvements. Les situations, les actions à effectuer, tout se présentait de façon très claire, en dépit des imprévus et des changements de rythme.

Au départ, je n’avais pas l’intention d’attacher ma proie rapidement, ni d’un seul coup. Je me laissais porter par la valse des corps, mes envies charnelles explicites, les mots utilisés à son endroit, ses réactions… J’avais certes prévu un gote, un futomomo, quelques variations de postures… mais certainement pas cette figure ayant toutes les allures d’un Ashikubi Kata-ashi Kaikyaku 足首片脚開脚.

Littéralement « cheville une jambe jambe ouverte ».

Merci bambou pour cette découverte!

Les extases sous-jacentes

Selon le psychologue Mihály Csíkszentmihályi, « le flow est un état totalement centré sur la motivation. C’est une immersion totale, qui représente peut-être l’expérience suprême, employant les émotions au service de la performance et de l’apprentissage ».

Le bonhomme continue :

« Dans le flow, les émotions ne sont pas seulement contenues et canalisées, mais en pleine coordination avec la tâche s’accomplissant. Le trait distinctif du flow est un sentiment de joie spontané, voire d’extase pendant une activité. »

J’ai la berlue où il parle de la dominasphère, topspace in English?

Je parle de cet état de béatitude où la personne qui domine une scène érotique part en orbite, tout en demeurant extrêmement concentrée dans ce qu’elle fait, que ce soit avec de la cire, de la corde ou un simple doigt qui effleure nonchalamment la peau d’une (belle) chatte qui crie famine!

Une pouliche au pied de son Maître (hiver 2019).

C’era una volta nell’ovest

La gourmandise et l’enchantement se sont poursuivis jusque sur la rue Notre-Dame, près de mon coin natal.

Quand j’étais ti-cul, l’enchantement passait par un arrêt chez Normand Patates, plus dans l’Ouest, près de la rue De Courcelles. Pendant que le paternel jasait jusqu’à plus soif avec le proprio des lieux, un de ses clients, j’y dévorais un casseau de frites et deux hot-dogs vapeur moutarde-chou, pendant que je lisais le Montréal-Matin comme un manga, c’est-à-dire en commençant par la fin.

Ce que je préférais par-dessus le comptoir tout, c’était la p’tite bière d’épinette.

La pouliche ardente

Quarante ans plus tard, l’enchantement prend place, cette fois-ci, dans la Petite-Bourgogne, à quelques jets de sperme de là.

Elle est assise non pas face à mouah, mais de biais. Nous sommes cuisse contre cuisse, joue contre joue. Le contact est meilleur, plus franc. J’aime bien la coller, elle. Elle sent bon. Toute soyeuse, en totale apesanteur. Son regard est plus doux qu’à l’accoutumée.

Elle, son nom c’est alezane. Je l’appelle indistinctement ma soumise d’amour, ma pouliche, la chienne de Monsieur, et bien d’autres sobriquets tous plus affectueux les uns que les autres.

Cette pouliche rieuse et indisciplinée me fut dépeinte pendant deux ans comme une personne instable, manipulatrice et égoïste… bonjour la projection! Cette pouliche ardente, dis-je, elle m’aime. Follement. Contre vents et marées, mari, convenances, épreuves… et tous ces jeux passifs-agressifs sans fin dont je ne soupçonnais pas l’existence. Pourtant, elle ne cessait de me prévenir, “Monsieur, votre femme…”

Cette fougueuse pouliche, je l’aime. Follement. Contre vents et marées, mensonges, manipulations… et tous ces jeux passifs-agressifs sans fin dont je ne devinais pas l’existence. Les effets, eux, par contre…

Celle qui se disait novice en tout, j’ai eu le privilège de la baptiser, de la diriger dans son apprentissage de l’obéissance, à lui apprendre à oser laisser Monsieur Valmont son Maître entrer en elle, et pas qu’au figuré… Le tableau serait incomplet si je n’ajoutais pas illico qu’elle apprend à oser entrer en Lui, et pas qu’au figuré… 🙂

Sushibari

Nous dégustons allegro ma non troppo, un poco maestoso un cornet de calmars frits en multipliant les ah et les oh. Puis nous dévorons a capriccio une généreuse assiette de makis qu’arrose un nihonshu dont la couleur « lait en poudre » n’annonce vraiment pas le bon goût, ni les effets rebondissants…

Que demander de mieux pour couronner cette superbe journée froide de solstice d’hiver?

Créer une utopie sexuelle
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À propos de Monsieur Valmont

Gentilhomme avec un côté « bum », amateur de typo et du jeu de go, je suis du genre à chauffer les fesses d'une belle pouliche, accompagné par du Rage Against The Machine... Ou du Chopin.

Sujet(s) de cet article : Dans la steppe, ligotage Publié le 31 décembre 2019 dans le blogue cercle O - cercleo.net

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