La question de la relation BDSM à distance revient souvent dans les forums BDSM. Le plus souvent, elle est décriée, vue comme un mal nécessaire, un pis-aller, voire un ersatz de la relation BDSM. Pourtant, à la réflexion, la distance se révèle un outil fort utile dans la relation BDSM.
Est-ce qu’une relation BDSM « sérieuse » à distance peut marcher? J’y crois.
Moi qui parcours la vaste toile BDSM depuis 1998… combien de fois ai-je croisé des soumises québécoises en relation avec des Goréens de l’Ouest canadien ou des doms du Vieux-Continent, souvent depuis un bon moment?
Ayant connu la vie de couple avec BDSM sous le même toit et la relation BDSM à distance avec une soumise mariée à un autre homme, je vois bien, avec le recul, que la distance s’avère utile pour creuser les motivations au BDSM de l’autre. Et d’abord les miennes.
Table des matières de cet article
L’usage de la distance dans l’établissement d’une relation BDSM
Selon mon appréciation, la distance sert les quatre éléments suivants dans l’établissement de la relation d’échange de pouvoir érotique :
- la mise en place du cadre,
- l’adaptation des parties,
- le temps requis,
- le recul nécessaire.
La mise en place d’un cadre relationnel
La distance offre des balises extrêmement intéressantes pour asseoir une relation de pouvoir érotique sur des bases solides. C’est-à-dire à la fois la dimension psychologique et la dimension physique.
La dimension psychologique
Avec les outils internet, tant la parole écrite que parlée est à notre portée.
Par l’écrit, le courriel favorise la profondeur et l’analyse; la spontanéité et le rythme des souffles caractérisent la messagerie instantanée. Et si on joint à ces outils le téléphone et le courrier postal…
La dimension physique
À partir du moment où le maître habite l’esprit de sa soumise et ses pensées, le physique coule de lui-même. Dominer l’esprit de la soumise, c’est enchaîner son corps par la volonté, les pensées, les mots et la voix, non?
Tous les moyens ci-haut offrent une profondeur que le face-à-face ne donne pas à prime abord. On en devine les raisons. Avec la messagerie et le courriel, nous pouvons aller très loin en peu de temps (même dans la lenteur) dans notre connaissance intime de l’autre. C’est inestimable.
Le temps est l’une des dimensions les plus importantes de la relation entre la soumise et son maître. Les gens ayant peu de disponibilité horaire de s’adonner à des activités spécifiques, ont alors accès à une alternative puissante.
Une bonne mesure
Enfin, la distance constitue une bonne mesure pour la personne soumise.
Elle va l’aider à déterminer si elle :
- se sent dans sa soumission,
- ressent, comprend et accepte le pouvoir de la volonté du maître qu’elle a choisi,
- est capable de sentir la domination de son maître à distance,
- est assez sérieuse dans sa démarche pour ne pas mentir, et surtout, se mentir à elle-même.
Entre vous et moi, si la personne soumise n’est pas en mesure de sentir le pouvoir du maître à distance, croit-elle vraiment qu’elle pourra le sentir en étant plus près?
L’adaptation
La distance sert admirablement l’apprivoisement. Chacun.e apprivoise son statut, sa place, l’autre. Il est alors possible de prendre le temps de se connaître, de reconnaître ce qui convient ou non.
La soumise novice est alors en mesure d’apprivoiser progressivement sa soumission. Elle peut donner forme à ses pensées, d’apprendre l’échange de pouvoir, l’obéissance, le respect et la confiance. Tout ça à travers de menus exercices et activités proposées par le maître. Celui-ci peut équilibrer tout ça en tenant compte des ancrages de la soumise que sont sa vie familiale, professionnelle, amicale, etc.
La distance permet au maître de poser les jalons du cadre de la soumission. Il peut serrer lentement mais sûrement les mailles du cadre de sa domination, apprenant à connaître la personne soumise au-delà des discours et des activités.
La distance, un outil utile
L’un des aspects méconnus de l’utilité de la distance, c’est son rôle de révélateur.
Je pense qu’une personne « joueuse » ne peut tenir le coup de cette distance, son implication et ses effets. À moins, peut-être, d’avoir plusieurs partenaires. La personne soumise, elle, s’en délectera. Elle va réaliser que cette formule lui procure toute la latitude voulue pour gérer ses différents aspects identitaires.
En somme, grâce à la distance, nous pouvons très bien mettre en place un cadre relationnel BDSM simple. Un tel cadre ne peut qu’être à la fois solide et souple. Il doit respecter le rythme de la soumise et lui permettre de bâtir son équilibre entre les différentes facettes de sa vie.
Et surtout, ce cadre doit favoriser son apprentissage de l’obéissance et de toute autre matière (et manière) que le Maître souhaite qu’elle apprenne, au-delà de la simple dimension sexuelle.
Le temps requis
L’échange de pouvoir érotique demande du temps. Du temps de préparation de scénarios, du temps de leur réalisation et du temps d’actualisation des apprentissages. C’est d’autant plus vrai quand les dimensions psychologiques sont plus présentes. Ça requiert beaucoup d’énergies de part et d’autre, il va sans dire.
La distance nous offre ce luxe.
Il donne à la soumise le temps requis pour apprendre, pour se préparer mentalement, physiquement. On sait que la soumission « est le résultat d’un long processus, d’un long travail, passant par de nombreuses phases successives devant être pleinement vécues, comprises et acceptées. »
La distance donne le temps à la soumise d’assimiler, de réfléchir, le temps de lire, le temps d’écrire. Une plus grande proximité, du moins à ce stade-ci, pourrait pervertir le processus.
En d’autres mots, si la soumise et son Maître habitaient à un coin de rue l’un de l’autre, ce qu’ils gagneraient en fébrilité et en plaisirs instantanés, folâtres et assurément agréables, nous en convenons, ils le perdraient en montée lente, progressive et ultime de leur désir et de leur relation.
Question de configuration relationnelle
Évidemment, cela est vrai pour une soumise et un Dominant qui souhaitent établir une relation bdsm à long terme. Ça s’applique sans doute moins à d’autres configurations.
Et puis, la dimension psychologique est merveilleusement servie par la distance, qu’en pensez-vous? Ce plaisir doux et fou de la faire languir… de lui faire perdre pied multo lento… de l’investir totalement par la pensée, les mots, les sons, les images… Au moment opportun, lorsqu’elle le rejoindra, elle sera déjà à ses pieds, fébrile et sereine en même temps. Il ne lui restera qu’à implorer son maître de la posséder corps et âme, qu’il fasse d’elle ce qu’il jugera bon… 🙂
Le recul nécessaire
Je crois sincèrement à une domination qui va au-delà des clichés et des modes observables ici et là. Je crois en son efficacité et dans les moyens de la mettre en place.
« Ceux qui choisissent de suivre l’enseignement des Latins le font par exigence personnelle et par désir de pousser au plus loin ce que sont leurs possibilités.
« Si la voie latine fait progresser plus vite c’est parce qu’elle est la plus complète et la plus épuisante aussi. Aucun de nos actes n’est gratuit, tout est raisonné.
« La voie latine est la plus rapide car la plus efficace mais aussi la plus difficile, la moins théâtrale et la plus cérébrale. Les actions qui y sont menées sont mûrement réfléchies, pesées et mesurées. Les manifestations ne sont pas toujours très spectaculaires mais toujours d’une redoutable efficacité. »
Ces propos tirés de l’ouvrage Les Amis de Germanicus vont au coeur de la démarche. Plus loin, son auteur ajoute : « notre art n’est pas un mode de vie au quotidien, c’est davantage un principe de fonctionnement de la pensée. »
L’importance du temps
Parmi les moyens de mettre en place une structure relationnelle de pouvoir, le plus simple et le plus exigeant est certainement celui du temps. Le temps sert à réaliser quatre choses :
- mettre en place le cadre qui convient aux besoins et aux désirs de la soumise;
- encadrer la soumise;
- utiliser les moyens mis à la disposition du Maître pour dominer la soumise;
- permettre à la soumise de comprendre ce qu’elle vit et pourquoi.
Le cadre qui convient
Je dis : le cadre qui convient aux désirs de la soumise. Il ne faut pas se méprendre. Le cadre à instaurer va respecter son désir d’apprendre, de progresser et de s’épanouir comme soumise et comme femme.
Ce cadre respectera son désir d’apprendre à obéir, servir et plaire à son maître, mais nullement les moyens que celui-ci prendra pour y parvenir. Il sera à l’écoute pour mieux recueillir toute l’information utile sur sa soumise afin qu’elle se retrouve à sa merci la plus complète.
Paradoxalement, elle est alors exactement là où elle veut aller.
La distance sert à actualiser les émotions et les sensations ressenties dans le cadre des œuvres du maître et de sa soumise, les gestes posés et les activités poursuivies.
Le fait de pouvoir aller très loin en elle, comme le fait qu’il puisse puiser profondément en lui pour y parvenir, fait voir toute la pertinence et l’extrême nécessité du temps requis pour progresser dans la difficile mais ô combien grisante relation d’échange de pouvoir érotique.
Céline écrit :
Bonjour,
Je suis toute novice dans la soumission je vis a huit mille km de Monsieur. Notre relation virtuel date d’il y a six mois, le destin devrait nous rapprocher très bientôt et jamais de ma vie je n’ai autant réfléchi ma sexualité, ressenti mon corps,désiré l’autre. Il y a un effet magique a tout cela c’est extrêmement puissant. De conversations anodine en camera coquine il est entrée en moi et je doit bien avouer que je trouve ce tango des plus délectable.
Hermine écrit :
Délicieusement instructif et captivant en diable.
Après une longue déshérence inhérente à une vie de famille bien remplie et une longue expatriation pour raison professionnelle, j’avoue que m’investir, avec la complicité de mon mari candauliste, dans une telle relation ne serait pas pour me déplaire…
Encore faut-il savoir où et comment trouver ce merveilleux Sir Stephen…
Loys écrit :
Super article .. J’adore ce que vous écrivez au sujet du temps .. Dominante, je le vois comme un merveilleux instrument que j’étire ou que je comprime suivant les besoins …et Mes désirs.. La domination à distance ne m’a jamais paru incongrue ou futile: Dominer est emprise sur l’Autre … L’envahir,le cerner … Un soumis , une soumise ne vit , n’existe pleinement ,que par ses instants présents ,advenus ou à venir avec son Maître ou sa Maîtresse.. Le Dominant est toujours présent par les consignes qu’il laisse et leur dead line, l’empreinte ( parfois au sens propre ),la joie prochaine de Le revoir …
Greygory écrit :
Bonjour,
Je suis en couple avec une femme depuis 8 ans. Nous nous sommes connus dans le libertinage. Elle a toujours apprécié le BDSM et nous avons des jeux réguliers, mais qui restent des jeux. Elle souhaitait quelque chose de plus axé sur le fait de se sentir soumise de manière plus régulière, et ne voulant pas aller vers cette voix dans notre relation de couple, je l’ai aidée à rencontrer des dominants.
Il y a eu donc des rencontres avec des dominants qui ne me dérangeaient pas car très limitées dans le temps.
Je pensais que la relation DS était le fait de réaliser ses fantasmes et d’ainsi mieux vivre sa sexualité, et elle a rencontré précédemment des Dominants pour des séances qui ne m’ont jamais dérangé. Nous nous « amusons » entre nous, mais je ne tiens pas à aller trop loin avec elle dans cette démarche, estimant que dans ce domaine d’autres sont plus qualifiés que moi et donc pouvaient plus lui permettre de réaliser ses fantasmes.
Je l’ai donc mise en relation avec un dominant qui me semblait fiable.
Ils se sont vus 2 fois plusieurs jours, ma femme l’ayant rejoint à Paris par avion, et donc le reste du temps ils sont en permanence en relation, tchat et appels, et j’ai l’impression aujourd’hui que notre couple ce n’est plus 2 personnes, mais 3.
J’en ai parlé au dominant, qui me dit qu’il trouve que ma possesivité devrait m’interroger (je reprends ses termes précis). De même pour la relation suivie, il m’explique que la soumise n’étant pas proche et ne pouvant pas la voir régulièrement, il fallait construire un lien
Dans la relation avec lui, j’estime qu’il aurait dû me parler de me parler de cette relation permanente qu’il estime devoir mettre en place puisqu’il ne peut pas la voir de manière périodique et régulière comme un soumis qui serait plus proche. Il le reconnait à demi-mots désormais :
LUI :
Pour info la distance oblige un lien d evolution . Des sequences par exemple tous les 15 j evite ce mecanisme de lien dense.
MOI :
Oui… Maintenant je sais… Mais à l’époque jamais tu m’as parlé de ça.
LUI :
Oh a mon sens… Manisfetement pas assez. J étais persuade que tu avais une autre connaissance. J intégre cela comme une piste d evolution
——
Je ne sais plus quoi faire. J’aime ma femme, je ne veux pas la perdre.
Qu’en pensez-vous ? Si vous êtes dominant, acceptez-vous de créer une relation forte en contact permanent avec une femme en couple (et dont le conjoint ne souhaite pas ce type de relation) ?
Et si vous êtes soumis(e) et en couple, comment voyez-vous une relation suivie extra-conjugale ?
Vos conseils sont les bienvenus. Suis-je simplement possessif ou dois-je accepter « parce que c’est le BDSM » tout ceci ?
Monsieur Valmont écrit :
Non, ce n’est pas ça le BDSM.
Les pratiques BDSM reposent sur un consentement éclairé de toutes les parties impliquées.
Créer une relation forte avec une femme en couple où le mari n’est pas d’accord, ce n’est pas une bonne idée. Le dominant peut à tout le moins chercher à le sécuriser, ce mari, l’inviter à faire savoir ses interrogations et l’aider à les formuler.
Cette démarche n’est pas vaine avec des gens de bonne volonté.
Littlediablesse écrit :
Non je n’accepterai pas en tant que Dom d investir une relation bdsm à distance ou réel avec un ou une sub don’t le partenaire ne serai consentant.
Déjà
1 expliquer ce qu’est le bdsm loin des clichés.
2 vérifier s il ou elle a compris
3 me renseigner auprès de la personne soumise pourquoi elle a envie de se soumettre à une inconnu.
4 expliquer les danger potentiels pour le couple l’attachement notamment qui est très fort en relation DS et les risques qui vont avec pour le couple.
5 être sur que le mari ou la femme est près à avoir disons le un concurrent affûté en maîtrise
Et si c est non à l’un des points on laisse tomber.
Le but du bdsm c est le bien être de l’autre, de son psychisme et de ses besoins.