L’amour, l’amour, toujours l’amour…
« Il me faut préciser ici qu’en matière d’éducation anglaise durable, il n’existe pas de domination sans sentiment. La soumise doit aimer son Maître; et le Maître son esclave. »
C’est un Maître qui le dit. Pourquoi l’arrêter en si bon chemin?
« La relation paradoxale qui s’installe entre celui qui ordonne, et celle qui subit, est forcément marquée du sceau de l’amour. Non que je veuille aller dans le sens de l’adage « Qui aime bien châtie bien », mais tout de même il y a quelque chose qui tient à cela, qui constitue du moins le nectar étrange, siroté jusqu’à la lie, dont les ingrédients sont un doux mélange de douleur et de jouissance pour atteindre un plaisir au plus haut du ciel.
« Ce qui explique que la relation Maître/soumise, lorsqu’elle perdure, est infiniment personnalisée, et sans ce qu’apporte le domaine affectif en sensations exacerbées, il n’existe pour moi point de salut : toute pratique qui en fait abstraction relève de méthodes sadomasochistes décadentes ou de simples désirs d’échangisme déguisés. »
La rareté des soumises authentiques
« J’évite autant que possible ces dérives en ma Cave (l’espace donjon de l’auteur), mais je mentirais si j’affirmais qu’aucune femme ne s’y présente avec pour unique motivation de se faire enfiler par mes godes à pattes. Cette engeance ne possède pas une once de ce qui transcende une soumise, elle ne donne rien, et se contente de prendre ce qui l’intéresse : de grosses queues à la chaîne.
« Je veille au grain, naturellement. Mais je dois confier que les authentiques soumises ne sont pas si nombreuses que cela. Et elles seules me captivent, car leur quête du plaisir est couplée à une complète forme d’abandon de soi.
« L’on comprendra mieux sans doute que « j’aime » mes soumises d’un « amour » sans équivoque, et qui ne sort – en principe – jamais du cadre du Donjon : elles ont en effet pour la plupart un homme dans leur vie, parfois un dominateur, et je me garde bien d’entrer en compétition avec eux dans quelque registre que ce soit. Je ne prends dans la vie de mes soumises que la place qui m’est accordée, pas un centimètre de plus, et je mets un point d’honneur à établir une sorte de séparation entre l’Église et l’État : les enthousiasmes excessifs à mon égard, qui débordent du cadre établi, sont systématiquement refrénés par mes soins.
« Je conserve les lettres d’amour que je reçois, mais j’évince, en toute élégance, celles qui voudraient conduire leur couple vers une situation périlleuse à cause de ma présence. L’expérience de plaisirs interdits que je prétends leur apporter ne peut en aucun cas nuire à l’équilibre de leur relation amoureuse, et si je m’y immisce quelquefois – c’est extrêmement rare -, nous nous placerons alors dans une triangulaire souhaitée, et totalement assumée. »
Patrick Le Sage dans Journal d’un maître, récit, Flammarion, 2005.
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